Veille juridique

Formation des usagers des services publics à l'usage d'internet

Rédigé par ID.CiTé le 14/08/2019



Réussir la transition numérique de l'Etat implique de lutter résolument contre l'illettrisme numérique qui touche près de 13 millions de français (d'après le Baromètre 2018 du Numérique, réalisé par le CREDOC pour l'Etat et l'ARCEP). Le récent rapport du Défenseur des Droits rappelle que 500 000 Français n'ont pas accès à une connexion internet fixe et que plus de 30% des Français ne sont pas familiers des usages numériques. Y remédier nécessite d'une part de lutter contre la fracture numérique, avec les moyens humains, techniques et financiers appropriés de manière à produire des démarches de qualité et d'autre part d'améliorer la couverture numérique des territoires. 


1/ Former les usagers et professionnaliser les aidants : Il s'agit tout d'abord d'agir spécifiquement sur une partie de la population qui n'est pas suffisamment formée aux usages numériques. La stratégie nationale d'orientation de l'action publique annexée au projet de loi pour un Etat au service d'une société de confiance affirme que "l'administration doit assurer, notamment aux personnes vulnérables ou n'utilisant pas l'outil numérique, des possibilités de communication et de médiation adaptées à leurs besoins et à leur situation". 
C'est dans ce cadre que s'inscrit la "Stratégie nationale pour un numérique inclusif". Elle est exposée dans un rapport largement concerté. Plusieurs actions ont d'ores et déjà été mises en oeuvre pour lutter contre la fracture numérique. Après une expérimentation dans trois territoires (la Drôme, la Gironde et la Réunion), le 19 juillet 2018, le Président de la République a annoncé le déploiement national du Pass numérique. Son budget global atteindra "100 à 150 millions d'euros" avec l'objectif de "former et accompagner 1,5 millions de personnes par an". Le programme prendra la forme d'un crédit de 10 à 20 heures de formation, en fonction des profils, d'une valeur de 50 à 100 euros. Pôle Emploi, la Caisse d'allocations familiales (CAF), l'Assurance maladie, les villes, les agglomérations et les départements pourront distribuer ce crédit formation. 
De plus, un programme gratuit en ligne (PIX) a été créé afin que les usagers puissent mesurer et développer leurs compétences numériques. Un parcours PIX pour les compétences de base et un dispositif de diagnostic rapide sont en cours de développement. 2000 épreuves ont été testées en panel, 700 tutoriels sélectionnés et recommandés dans une démarche collaborative. 270 établissements scolaires et d'enseignement supérieur sont engagés dans la démarche. https://pix.fr  Au-delà des usagers, la création d'un réseau d'aidants et leur professionnalisation est un enjeu essentiel de la politique de dématérialisation des démarches administratives. Plusieurs dispositifs ont déjà été mis en place : Un kit à destination des aidants  pour accompagner les individus en difficulté a été développé  

Trois niveaux d'accompagnement ont été définis : 
- Urgences numériques (pour ne pas perdre un droit ou une allocation, ou ne pas encourir une pénalité), inclusion numérique (pour gagner en autonomie) et montée en compétences numériques. Une coopérative (Med Num) a été créée pour structurer les acteurs de la médiation numérique et garantir un service de qualité et accessible sur tout le territoire. 70 sociétaires y sont actuellement regroupés 
Aidants Connect : Déployé à travers une start-up d'Etat, ce dispositif doit permettre à un aidant numérique de réaliser des démarches administratives en ligne à la place d'une personne ne parvenant pas à les faire seule et de sécuriser la réalisation par un tiers-aidant. Une présentation d'un 1er prototype fonctionnel est prévue fin août. Les premiers déploiements de l'outil sont prévus pour 2020. Enfin, dans le cadre de l'initiative Carte Blanche, a été créé Administration +, une plateforme  qui met en relation des aidants (comme des travailleurs sociaux) avec des agents d'organismes publics afin de régler les blocages administratifs pour le compte d'usagers  

Réussir la formation des usagers et des aidants nécessite enfin de renforcer l'information sur les dispositifs existants et de canaliser l'ensemble des initiatives lancées : 
Une plateforme  a été développée pour agréger les ressources. 
- Un espace éditorial a été créé (Le Labo) proposant des données et savoirs précis afin de renforcer l'information et la compréhension des usages numériques et orienter les politiques publiques. 
- Une cartographie des lieux  et services de la médiation numérique est également disponible. 
Une plateforme   mutualisant l'ensemble des ressources, a été développée spécialement pour les collectivités territoriales  ). Elle permet également d'établir la cartographie des lieux accompagnant les usagers à la réalisation de leur démarche en ligne. 
- Un incubateur a été créé pour regrouper l'ensemble des initiatives sur l'inclusion numérique (MedNum, APTIC, Aidants Connect).


2/ Accompagner les usagers dans des lieux de proximité 
La politique de dématérialisation des échanges entre les usagers et l'administration s'accompagne également de l'ouverture de points d'accueil physique pour les usagers. En janvier 2019, 1271 maisons de services au public (désormais appelées maisons France Services) ont d'ores et déjà été ouvertes. 86% des usagers sont très satisfaits de l'accueil et de l'accompagnement (enquête BVA). 
Ces maisons de services au public ont vocation à devenir des interfaces privilégiées entre les usagers et l'administration en délivrant, en un lieu unique, une offre d'accompagnement personnalisé dans les démarches de la vie quotidienne (aides et prestations sociales, emploi, insertion, retraite, énergie, prévention santé, accès aux droits, mobilité, vie associative etc.). 

Le 3 mai 2019, le Premier Ministre a annoncé l'ouverture de 500 maisons France Services supplémentaires en milieu rural en 6 mois, avec des objectifs clairs d'amélioration de la qualité du service, d'augmentation des plages horaires et d'accompagnement renforcé. L'Etat et les opérateurs partenaires contribueront à hauteur de 36 millions d'euros par an à ces maisons France Service. Une action de labélisation est également en cours, pour 10 territoires qui expérimentent des outils issus du plan national pour un numérique inclusif (label "territoires d'actions pour un numérique inclusif"). Un nouveau programme interministériel ("Nouveaux lieux, nouveaux liens") a été créé pour donner accès à de nouvelles activités et de nouveaux services aux habitants partout sur le territoire grâce au renforcement des tiers-lieux.

Le 11 juillet 2019, pour accompagner et accélérer la dynamique de développement des tiers-lieux dans les territoires, le gouvernement a lancé l'appel à manifestation d'intérêt "Fabriques de Territoire". A travers ce programme, l'Etat financera le fonctionnement de 300 Fabriques, à hauteur de 75 000 à 150 000 euros sur 3 ans, à raison de 50 000 euros par an maximum. 15 millions d'euros seront offerts sous formes de subventions d'investissements gérées par les préfets. La première vague de l'appel à manifestation d'intérêt sélectionnera 30 “Fabriques Numériques de Territoire”, proposant aux habitants de quartiers prioritaires de la politique de la ville une large de gamme de services de montée en compétences numériques. 

Les Hubs France Connectée : Pour accélérer la consolidation de l'offre de médiation numérique sur l'ensemble du territoire et mettre en cohérence les politiques publiques en matière d'inclusion numérique, la Banque des Territoires de la Caisse des Dépôts et la Mission Société Numérique se sont associés pour faire émerger une dizaine de hubs territoriaux. Ces hubs ont vocation à incarner des têtes de réseau des acteurs de la médiation numérique. Ils fourniront un appui et des outils destinés à renforcer les actions d'inclusion et de médiation numérique. 5 millions d'euros seront engagés en 2019-2020 pour faire émerger 11 hubs territoriaux. 


3/ Accompagner les administrations centrales et locales dans la dématérialisation de leurs démarches 
L'enjeu pour accompagner ces publics est également d'outiller les administrations chargées de la dématérialisation de leurs démarches et de les acculturer à la démarche d'inclusion d'une part, et à la prise en compte de "l'expérience utilisateur" ("UX design") d'autre part. 

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Les collectivités territoriales et l'État ont défini en concertation 4 axes prioritaires pour construire ensemble des services publics numériques territoriaux : un socle commun (construire un socle commun d'applications, de "briques numériques", de référentiels et de cadres partagés pour accélérer la transformation numérique des territoires), une gouvernance partagée au sein de l'Instance Nationale Partenariale, une approche globale de la donnée, le passage à l'échelle. 
Afin de mutualiser les efforts des différentes collectivités locales, le gouvernement a lancé l'initiative Numérique en commun (s), un événement national rassemblant les acteurs du numérique au service du développement des territoires. Des formations sont en ligne afin d'inciter les agents locaux à répliquer ces évènements dans leurs territoires. Afin de lutter durablement contre l'illectronisme, la DINSIC s'est aussi engagée dans une politique d'amélioration de "l'expérience utilisateur" visant à faire progresser la qualité intrinsèque des démarches administratives.

Pour cela, elle a : Mis en place une "communauté UX" au sein de l'Etat, afin d'insuffler les compétences et la culture UX au sein des administrations ; Développé "Monavis.numérique.gouv.fr", qui permet aux utilisateurs d'exprimer leur avis sur une démarche dématérialisée, et sert ainsi de tableau de bord de la dématérialisation des procédures administratives. 1613 démarches sont aujourd'hui recensées. 

Lancé un programme de "Designers d'intérêt général", variante du programme Entrepreneurs d'intérêt général. Financé par le Programme d'Investissements d'Avenir à hauteur de 1,5M€ pour 2019, ce programme sélectionne les meilleurs projets d'amélioration UX des services publics en ligne et recrute une promotion de designers qui devra résoudre les défis lancés par l'administration. Dans le cadre de la loi pour un Etat au service d'une société de confiance, l'Etat expérimente le droit à l'erreur dans les démarches administratives. Le site oups.gouv.fr permet de recenser les erreurs fréquentes commises par les usagers et donne des conseils pratiques.


4/ Etendre la couverture numérique et mobile du territoire 
En dernier lieu, le Gouvernement a fait de l'amélioration de la couverture numérique (accès à internet sur les réseaux fixes comme couverture mobile) une priorité de son action au service de la cohésion et de la compétitivité des territoires. 
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Assemblée Nationale - R.M. N° 21624 - 2019-08-06