Ressources humaines

Le délit de harcèlement moral ne suppose pas une intention de nuire pour être caractérisé

Rédigé par ID.CiTé le 27/01/2020



Le corps de C... M... a été retrouvé sans vie à son domicile et une enquête a conclu à son suicide ; La défunte, médecin du travail, a laissé derrière elle des éléments écrits accusant son employeur de harcèlement moral et de non-respect de la législation sociale à son égard, exposant que sa mort devrait être imputée à sa hiérarchie ;
A la suite de la plainte des chefs de harcèlement moral et de discrimination en date du 8 octobre 2010, déposée au nom des membres de la famille de la victime et de plusieurs syndicats professionnels, et d'une enquête préliminaire, le procureur de la République a pris un réquisitoire introductif des chefs de harcèlement moral et homicide involontaire
(…)

Pour dire n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de harcèlement moral, l'arrêt énonce, la Cour de cassation retient, pour caractériser les éléments constitutifs du délit de harcèlement moral,
- l'existence d'agissements répétés, qui ont outrepassé les limites de l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur, et ont porté atteinte au droit, à la dignité et à la santé d'une salariée
- des actes fautifs ayant gravement dégradé les conditions de travail de la victime et ayant concouru à l'altération de son état de santé ;

Les juges ajoutent que si le délit de harcèlement moral suppose, pour être établi, des actes positifs et une véritable intention de nuire de la part du ou de ses auteurs, l'information judiciaire n'a mis en évidence aucun propos ou comportement répétés susceptibles de traduire une telle intention délibérée, tels qu'une mise à l'écart, des propos insultants ou menaçants, des comportements humiliants ou méprisants ou encore des pressions insupportables ;

En se prononçant ainsi, la chambre de l'instruction, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, en l'espèce l'exigence d'une intention de nuire, a violé le texte susvisé et méconnu le principe susénoncé ;

La Cour de cassation CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar, en date du 5 juillet 2018, mais en ses seules dispositions relatives au non-lieu prononcé des chefs de harcèlement moral et homicide involontaire, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil...

Cour de cassation N° de pourvoi: 18-85367 - 2019-11-13