Veille juridique

Opérations de débardage et d'aménagement forestier dans les sites Natura 2000

Rédigé par ID.CiTé le 29/08/2019



La France s'est engagée, au travers du plan climat et des orientations de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Comme le rappelle la SNBC, le secteur de la forêt et du bois est un vecteur stratégique pour y parvenir, par la séquestration et le stockage de carbone dans les écosystèmes forestiers et par la production de matériaux et d'énergie biosourcés et renouvelables se substituant aux produits d'origine fossile. 

Pour maximiser ces effets de substitution et de stockage de carbone dans les produits bois, la SNBC cible notamment comme levier la récolte accrue du bois, en articulation avec les enjeux de préservation de la biodiversité. Ces objectifs sont au cœur du programme national de la forêt et du bois (PNFB), qui encadre la politique forestière pour la période 2016-2026, encourageant une augmentation de la mobilisation de bois dans le cadre d'une gestion durable et multifonctionnelle de la forêt. Celle-ci passe par des pratiques respectueuses de l'environnement (enjeux de protection de la biodiversité, des sols, des ressources en eaux et des paysages) et est encadrée par des dispositions réglementaires rigoureuses définies dans les articles L. 124-1 à L. 124-6 du code forestier. La prévention du tassement des sols est une préoccupation majeure des forestiers, et les organisations professionnelles diffusent des documents d'informations préconisant les bonnes pratiques et proposant des solutions de prévention adaptables aux contextes. 

Ainsi, le guide PROSOL  (2009) prône une exploitation respectueuse des sols et de la forêt et les recommandations issues des travaux pluridisciplinaires dont il a fait l'objet sont directement intégrées dans la politique environnementale de l'office national des forêts (ONF) et dans ses réglementations (règlement national d'exploitation forestière). La mise en place de cloisonnements d'exploitation dans les parcelles et l'adaptation des travaux forestiers selon les conditions météorologiques en font partie. 
Plus récemment, l'ONF et la fédération nationale des entrepreneurs de travaux forestiers (FNEDT) ont publié le guide Pratic'sols  (2017), décrivant l'état actuel des connaissances scientifiques et techniques sur le sujet. Il met notamment en évidence les progrès techniques réalisés par les constructeurs afin de diminuer la pression exercée par les engins sur les sols forestiers. La mobilisation de la ressource forestière dans des conditions économiques et environnementales optimisées demande l'installation d'un réseau de desserte, suivant des techniques maîtrisées par les professionnels de la forêt. Ces voies d'accès aux peuplements sont indispensables pour conduire les opérations sylvicoles, pour limiter la surface circulée par les engins forestiers dans le massif et pour lutter contre d'éventuels incendies ou secourir les personnes. 

Ces impératifs de gestion ne doivent cependant pas justifier des travaux de génie civil dérogeant aux standards habituels en la matière. Lorsque ceux-ci bénéficient d'aides publiques, les services de l'État veillent à la cohérence de ces travaux. 

Par ailleurs, des schémas directeurs de desserte forestière sont conçus à l'échelle d'un massif forestier et prennent en compte les contraintes physiques, paysagères ou foncières mais aussi la sensibilité du milieu, ainsi que la réglementation environnementale en vigueur. Cette planification de la voirie forestière est menée en concertation avec les acteurs agissant sur ce territoire.

Concernant les forêts situées en site Natura 2000, les impacts des travaux forestiers sont pris en compte dans les évaluations d'incidences Natura 2000.
Ce régime d'évaluation, instauré par la directive européenne du 21 mai 1992 dite " directive Habitats, Faune, Flore", impose que toute activité susceptible d'affecter de manière significative un site Natura 2000 doit faire l'objet d'une évaluation de ses incidences sur les objectifs de conservation du site. Cette obligation a été transcrite en droit français dans lequel, en particulier, l'article R. 414-19 du code de l'environnement précise que chaque coupe ou travail forestier prévu y est soumis, et ce indépendamment du fait que les forêts concernées disposent ou non d'un document de gestion durable. Les documents de gestion durable sont eux-mêmes systématiquement soumis à évaluation des incidences en site Natura 2000. Les recommandations et les prescriptions pour atténuer ou supprimer les incidences potentielles des travaux forestiers y sont étudiées. Si l'évaluation ne permet pas de conclure de manière certaine à l'absence d'impact significatif sur les habitats et les espèces d'intérêt communautaire, les documents de gestion sylvicole, les coupes et travaux forestiers sont refusés.

Sénat - R.M. N° 10925  - 2019-08-22