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Rémunération du maître d'œuvre - Appréciation du taux de tolérance

Rédigé par ID.CiTé le 20/07/2020



Le montant des travaux modificatifs décidés par le maître de l'ouvrage ne doit pas être pris en compte pour l'appréciation du dépassement du seuil de tolérance, tant au cours de l'exécution du contrat que lors de la liquidation définitive de la rémunération du maître d'oeuvre.

En revanche, il ne résulte ni des mêmes stipulations, ni d'aucune autre stipulation applicable, ni d'aucune disposition légale ou réglementaire, ni enfin d'aucun principe, que le montant des travaux supplémentaires ne résultant pas de modifications imposées par le maître de l'ouvrage mais rendus indispensables à la réalisation de celui-ci suivant les règles de l'art réalisés devrait être, en tout ou partie, exclu de cette appréciation, contrairement à ce que soutiennent les requérants.

En l'espèce, il résulte de l'instruction que le montant total des travaux exécutés en dépassement du seuil de tolérance, calculé conformément aux stipulations précitées de l'article 14 de son cahier des clauses administratives particulières, était de 1 271 524,40 euros hors taxes. Il en résulte également, en particulier de la liste des travaux supplémentaires produite par la requérante, que la ville de Marseille a exigé en cours de chantier la réalisation de travaux modificatifs pour des montants de 614 206,52 euros hors taxes au titre du lot n° 1, 21 733,99 euros hors taxes au titre du lot n° 3 et 410 692,25 euros hors taxes au titre du lot n° 4. Compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, le montant des travaux supplémentaires réalisés en dépassement du seuil de tolérance et imputables au groupement de maîtrise d'oeuvre s'élève ainsi à 224 891,64 euros hors taxes.

En vertu des stipulations de l'article 16 du même cahier, le montant de la pénalité encourue à ce titre par la maîtrise d'oeuvre doit être fixée à 54 198,89 euros hors taxes. Dans ces conditions et alors que la ville de Marseille ne conteste par aucun autre moyen le décompte final de la société Atelier d'architecture Franck Hammoutène, les requérants sont seulement fondés à réclamer à la commune la somme de 58 584,36 euros hors taxes, correspondant à la différence entre ce solde et la pénalité due.

En deuxième lieu, aux termes de l'article 9 de la loi du 12 juillet 1985, applicable au litige : " La mission de maîtrise d'oeuvre donne lieu à une rémunération forfaitaire fixée contractuellement. Le montant de cette rémunération tient compte de l'étendue de la mission, de son degré de complexité et du coût prévisionnel des travaux. ". En vertu des dispositions de l'article 30 du décret du 29 décembre 1993 pris pour son application, également applicable : " Le contrat de maîtrise d'oeuvre précise, d'une part, les modalités selon lesquelles est arrêté le coût prévisionnel assorti d'un seuil de tolérance, sur lesquels s'engage le maître d'oeuvre, et, d'autre part, les conséquences, pour celui-ci, des engagements souscrits. (...) En cas de dépassement excédant le seuil de tolérance fixé par le contrat de maîtrise d'oeuvre, la rémunération du maître d'oeuvre est réduite.

Le contrat de maîtrise d'oeuvre détermine les modalités de calcul de cette réduction qui ne peut excéder 15 p. 100 de la rémunération du maître d'oeuvre correspondant aux éléments de missions postérieurs à l'attribution des contrats de travaux. (...) En cas de modification de programme ou de prestations décidées par le maître de l'ouvrage, le contrat de maîtrise d'oeuvre fait l'objet d'un avenant qui arrête le programme modifié et le coût prévisionnel des travaux concernés par cette modification, et adapte en conséquence la rémunération du maître d'oeuvre et les modalités de son engagement sur le coût prévisionnel. (...) ".

Il résulte de ces dispositions que le titulaire d'un contrat de maîtrise d'oeuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l'ensemble de ses charges et missions, ainsi que le bénéfice qu'il en escompte, et que seule une modification de programme ou une modification de prestations décidées par le maître de l'ouvrage peut donner lieu à une adaptation et, le cas échéant, à une augmentation de sa rémunération. La prolongation de sa mission n'est de nature à justifier une rémunération supplémentaire du maître d'oeuvre que si elle a donné lieu à des modifications de programme ou de prestations décidées par le maître d'ouvrage.

En outre, le maître d'oeuvre ayant effectué des missions ou prestations non prévues au marché de maîtrise d'oeuvre et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage a droit à être rémunéré de ces missions ou prestations, nonobstant le caractère forfaitaire du prix fixé par le marché, si elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, ou si le maître d'oeuvre a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat.


CAA de MARSEILLE N° 17MA01907 - 2020-06-15