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Gestion des conflits d’usage en situation de pénurie d’eau (Rapport d'information)

Rédigé par ID.CiTé le 05/06/2020



Gestion des conflits d’usage en situation de pénurie d’eau (Rapport d'information)
Alors que la recharge annuelle d’eau est estimée aujourd’hui à 175 milliards de mètres cubes, les usages de la ressource s’élèvent, hors barrages hydroélectriques, à 37 milliards de mètres cubes. Si ces données de prélèvements agrégées semblent à première vue relativement faibles au regard de la recharge annuelle, elles masquent la réalité des besoins et de la ressource en eau disponible : les conflits d’usage émergent quand la ressource, à un instant, en un lieu donné et pour une qualité donnée, ne permet pas, ou plus, de satisfaire les différents usagers. Dès lors, les changements climatiques vont réduire la quantité d’eau disponible durant la période de sécheresse estivale, ce qui ne va qu’accroître les risques de conflits d’usage.

Pour bien partager la ressource en eau, il est nécessaire de bien la compter.
Cela implique d’en connaître tant l’état et les perspectives d’évolution que les différents usages. Nombre de conflits que la mission d’information a étudiés sont nourris par des incertitudes quant aux données sur l’état de la ressource localement disponible et sur les volumes captés par les différentes parties prenantes au conflit.
Mais indépendamment des améliorations que l’on peut apporter aux dispositifs de gestion des crises, les changements climatiques nécessitent d’aller plus loin : il n’est plus possible de se contenter de mesures d’urgence, prises lorsque la situation est déjà dégradée.

Il est donc important d’inciter les différents usagers à la sobriété : cela signifie moins consommer, mais également mieux consommer.

Enfin, il est essentiel de réfléchir à une gestion réellement collective de la ressource sur le long terme afin d’anticiper et de prévenir des conflits d’usage à venir.

La mission recommande :
- d’étendre le réseau piézométrique national à 2 000 points à l’horizon 2024…

- d’abroger l’arrêté du 4 mai 2017 relatif à la mise sur le marché et à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et de leurs adjuvants

- de réactualiser en 2020-2021 le projet Explore 2070 qui étudie l’impact des changements climatiques sur la ressource et les réserves d’eau…

- de faire évoluer l’indicateur utilisé pour les seuils d’alerte qui déclenchent les mesures de restriction des prélèvements d’eau…

- que les acteurs privés prélevant de l’eau fournissent des données mensuelles, et non plus annuelles, sur leurs prélèvements

- de rendre obligatoire la transmission à la commission locale de l’eau (CLE), à la demande de cette dernière, des données sur l’état de la ressource et des réserves d’eau détenues par des personnes privées prélevant sur le territoire d’un SAGE…

- que les dispositifs de captation domestique, les futurs ouvrages comme les installations plus anciennes, fassent l’objet d’une déclaration obligatoire, et de sanctions si cette formalité n’est pas respectée.

- de systématiser le déclenchement des mesures de restriction au franchissement des seuils d’alerte et d’harmoniser les données prises pour référence au sein d’un même sous-bassin ;

- de traiter à égalité avec les autres besoins en eau l’intérêt des milieux aquatiques, tout en s’assurant de l’existence d’une solidarité entre tous les usagers du sous-bassin, même symbolique ;

d’objectiver les dérogations aux restrictions d’usage qui sont accordées, notamment par l’identification de situations types définies explicitement au niveau des arrêtés-cadres, et de les rendre publiques ;

- de renforcer la coordination entre départements d’un même sous‑bassin versant, s’agissant à la fois du déclenchement des mesures de restriction, de la définition des mesures adaptées au territoire, de l’harmonisation des dérogations et des contrôles réalisés ;

- de poursuivre la consultation régulière des comités sécheresse créés dans les départements qui ont été touchés par la sécheresse de 2019 afin de réfléchir à l’accompagnement des prochaines crises et de généraliser leur instauration dans les autres départements afin d’améliorer la concertation dans la gestion des épisodes de crise ;

- de délictualiser la récidive en cas non-respect des mesures de restriction d’eau en période de sécheresse, qui serait alors sanctionnée d’une amende d’un montant de 15 000 euros ;

- de renforcer les moyens humains affectés aux services en charge de la police de l’eau et de mieux associer les magistrats du parquet aux mesures liées à la sécheresse et aux usages de l’eau.

- de suivre avec attention les résultats du groupe de travail visant à identifier les freins au développement des différentes pratiques de réutilisation des eaux non conventionnelles…

- de renforcer, notamment dans le cadre de paiements pour services environnementaux, le recours aux solutions fondées sur la nature et d’inciter les communes et intercommunalités à désimperméabiliser leurs territoires, afin de se rapprocher du cycle naturel de l’eau et ainsi favoriser la recharge des nappes souterraines et l’alimentation des cours d’eau ;

- de rendre obligatoire une tarification incitative à la réduction de la consommation d’eau, s’agissant tant des redevances sur les prélèvements sur la ressource en eau collectées les agences de l’eau que de la facturation de la consommation d’eau potable des usagers…

- d’abandonner le système de mise en concurrence des barrages hydroélectriques, qui pourrait être remplacé par un système proche de la régie, permettant d’octroyer sans mise en concurrence des concessions à une structure publique dédiée…

- de déployer une information du grand public plus explicative et responsabilisante sur les enjeux de l’eau et les mesures de restriction prises en période de pénurie afin d’encourager la sobriété des usages.

- la création d’un fonds de paiement pour services environnementaux (FPSE), doté d’un budget total d’un milliard d’euros sur la période 2021/2025, dont la gestion serait assurée par bassin par les agences de l’eau…

- de faciliter l’appropriation des documents techniques

- de s’assurer d’une composition et d’un fonctionnement des comités sécheresse ainsi que des instances locales de gouvernance qui garantissent l’expression équilibrée des différentes parties prenantes à l’usage des eaux ;

- de confier aux services de l’État, ou à défaut à la CNDP, un rôle actif de médiateur dans l’animation des instances locales de gouvernance de la régulation de l’eau et d’octroyer aux services déconcentrés du ministère chargé de l’environnement, dans les instances locales de concertation, un droit d’opposition qui rendrait effective leur position de garant de l’intérêt commun ;

- que les PTGE ou les PGRE soient mis en place partout où des tensions sur la ressource en eau émergent, en les intégrant au SAGE quand il existe, afin de leur donner une portée réglementaire et que ceux existants soient rendus parfaitement cohérents avec les SAGE déjà adoptés ;

- à plus long terme, de rendre obligatoire la déclinaison en SAGE des SDAGE 2027-2032 sur tout le territoire national, en prenant soin d’identifier les structures qui pourraient conduire la démarche, tout en laissant aux parties prenantes leur autonomie pour définir les objectifs et les actions localement nécessaires.


Assemblée nationale - Rapport n°3061 - 2020-06-04
 





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